Par Marie-Claude Chazot, DRH Europe du Sud et International chez Sage
« Au centre de la difficulté se trouve l'opportunité », disait Albert Einstein. La crise que nous traversons laissera des traces. Plusieurs métiers de l’entreprise ont dû se remettre en question, se réinventer ou se renouveler. Très vite, et même plus rapidement que prévu, les compétences comportementales se sont révélées aussi importantes que les compétences techniques. Au-delà des aspects organisationnels que les professionnels des RH ont dû gérer (mise en place du télétravail, suivi des décrets législatifs, etc.), de nouveaux enjeux sont revenus au premier plan, notamment la place de l’humain, ainsi que la valeur et le sens du travail.
Passer de la résilience à la proactivité
Présents sur tous les fronts depuis le début de la crise (sur des aspects juridiques, organisationnels, technologiques ou encore budgétaires), les DRH sont les garants du lien social au sein de l’entreprise. Si l’avenir semble s’éclaircir avec la vaccination et le scénario de l’immunité collective, la crise sanitaire a bel et bien marqué un tournant : de nouvelles façons de travailler sont apparues et les comportements ont changé.
Une table ronde organisée par Sage en novembre 2020 sur la transformation sociétale et numérique des métiers RH a été l’occasion d’entrevoir de nouvelles opportunités pour la profession. Au-delà de la résilience, l’enjeu pour les fonctions RH est de prendre des risques pour répondre aux nouveaux souhaits et exigences des collaborateurs, mais aussi du marché, avec une seule réponse : l’audace.
Cette « soft skill » peut se transcrire par la gestion d’un projet ambitieux, pragmatique et sa prise en main de A à Z. Quel qu’il soit, les étapes qui le constitueront rendront visibles les efforts du DRH, son engagement, mais aussi sa capacité à se réinventer durablement. De nombreuses actions peuvent être mises en œuvre pour incarner les valeurs de l’entreprise, comme le renforcement du lien social, les programmes sur la diversité et l’inclusion, la flexibilité organisationnelle, ou encore la mise en place de canaux d’échanges avec les collaborateurs.
Selon une récente étude réalisée par OpinionWay*, 52 % des professionnels interrogés estiment que la prise en compte des enjeux RSE est le principal changement au sein des entreprises ces derniers temps - devant la transformation digitale ou le développement de la mobilité. L’engagement en faveur de la transition écologique compris dans les démarches de RSE représente un enjeu considérable pour les entreprises, que les RH doivent prendre à bras le corps pour en assurer la réussite.
L’audace et le risque : de l’importance du pragmatisme et de l’écoute
L’audace est une qualité qui ne se traduit pas forcément par l’ampleur d’un projet ou d’une action. On peut faire preuve d’audace sur de petits projets, qui auront un impact conséquent sur l’organisation de l’entreprise et qui n’en demeureront pas moins innovants ou bénéfiques à court, moyen ou long terme. Au regard de l’année écoulée et des défis à venir, il ne s’agit pas d’ajouter un nouveau fardeau à porter, qui sera délaissé dès qu’une nouvelle urgence arrivera. Si, en effet, des contraintes et des moments de doute peuvent tuer un projet dans l’œuf, rien n’empêche un DRH ou un collaborateur de progresser sur un projet petit à petit et d’adapter sa réalisation en fonction des retours qu’il aura obtenu et des évolutions de la situation. La prudence est loin d’être l’ennemie de l’ambition.
De nombreuses découvertes et innovations ont pu émerger des complexités dans l’exécution de certaines tâches. En l’occurrence, des idées pour l’intégration de nouveaux collaborateurs ont pu surgir dans ce contexte de télétravail généralisé.
L’observation et l’analyse, qui permettent de mettre en exergue des besoins jusqu’alors non identifiés, sont le premier pas vers l’évolution des pratiques. L’entreprise devient alors une sorte de laboratoire vivant où l’innovation est intégrée par touches successives. Les éléments mis en place et les retours reçus de la part des collaborateurs permettent d’analyser les résultats pour adapter et articuler le projet en accord avec l’identité de l’entreprise. Afin d’orchestrer ces projets innovants, l’implication des managers est importante car ils ont les piliers pour amorcer le changement et encourager la nouveauté.
Pour reprendre une citation de Pline Le Jeune, « l’audace croît à l’expérience », et cette année écoulée a permis de le démontrer.
Dans les faits, l’innovation ne requiert parfois qu’un simple changement de paradigme. Si la crise a été un accélérateur de transformation, il est à présent temps de capitaliser sur le souhait des salariés de s’engager dans un projet d’entreprise nourri par ses valeurs, et ce, malgré la distance. Contrairement à l’année 2020, il n’est plus question de faire preuve d’innovation par obligation et/ou avec un sentiment d’urgence. La situation au sein des entreprises et les modes de travail ont évolué. Toutefois, si les besoins persistent, toute prise de risque sera payante, qu’elle s’avère fructueuse ou non.
*Étude OpinionWay Sage sur la transformation digitale des entreprises, novembre 2020