Dr Roland Abel, Director - Employee Experience (EX) Strategy EMEA
Nombreuses sont les grandes entreprises qui ont sonné le glas de la fin du 100% télétravail pour l’horizon 2025, obligeant leurs collaborateurs à revenir au bureau à raison de 3 à 5 jours par semaine.
L’objectif : renforcer le travail en équipe, favoriser l’innovation et rompre l’isolement des collaborateurs. Des décisions qui interviennent dans un contexte où le désengagement et le mal être des salariés ne cessent de croître alors que l'engagement était en hausse régulière jusqu'en 2020, année du pic de l'épidémie de covid, avance une étude de l'institut Gallup réalisée en juin dernier. En effet, selon l’étude, la tendance s’inverserait depuis 2022, avec une frustration accrue des salariés qui se sentent de plus en plus mis sous pression sans savoir ce qu’on attend clairement d’eux. En conséquence, seulement 7% des collaborateurs français se déclarent engagés dans leur travail.
Face à ce constat, les entreprises placent plus que jamais la santé et le bien-être des salariés au cœur de leur priorité. Mais en font-elles suffisamment ? Et la fin du 100 % à distance constitue-t-elle une piste (vraiment) plausible ?
Prendre conscience des défis
Si des millions de collaborateurs ont profité d’une flexibilité retrouvée pendant la pandémie, pour beaucoup, l’estompement des frontières entre vie professionnelle et vie privée a entraîné l’apparition de symptômes d’épuisement professionnel. Alors que le travail à distance représentait une sorte de libération, d’autres ont souffert de désengagement, d’anxiété et de stress face aux incertitudes engendrées par la situation. Il est donc devenu urgent de veiller à ce que les environnements de travail cultivent le bien-être des salariés, en faisant de la santé mentale un élément clé de cette démarche.
Les entreprises négligeant cet aspect sont confrontées à des répercussions financières importantes – des taux de rotation élevés à la baisse des performances et de la productivité des salariés, jusqu’à des risques de responsabilité civile dans certains pays.
Alors que le contrat psychologique entre employeurs et employés a changé et que les nouveaux talents évaluant l’attractivité des organisations mettent l’accent sur les niveaux de stress, il est essentiel pour les entreprises de reconnaître les facteurs affectant la santé mentale au bureau.
On peut identifier quatre éléments influençant le bien-être des employés : l’alignement, le soutien, la résilience et l’équilibre :
1. L’alignement fait référence à la synergie entre le rôle d’un collaborateur ses compétences et la mission de l’entreprise. Cette synergie peut aider à atténuer le stress et les symptômes de l’épuisement professionnel.
2. Le soutien inclut la disponibilité, et la perception de l’aide reçue de la part des responsables et collègues, les politiques en place, ainsi que l’accès à une prise en charge par des spécialistes et à des applications.
3. La résilience concerne les ressources personnelles qui permettent aux individus de faire face aux difficultés et de maintenir un bon niveau de santé mentale malgré les exigences de leur travail.
4. L’équilibre – peut-être l’élément le plus essentiel – évalue dans quelle mesure les collaborateurs parviennent à gérer les pressions professionnelles sans qu’elles prennent le dessus sur leur vie personnelle.
L’instauration d’une culture mettant l’accent sur ces quatre axes peut transformer la dynamique sur le lieu de travail. Cependant, ces piliers ne se suffisent pas à eux seuls, et les salariés doivent disposer d’un environnement et de conditions de travail de qualité pour y parvenir. De nombreuses entreprises réalisent déjà que le bien-être des collaborateurs doit être leur priorité pour obtenir de meilleurs résultats en matière d’engagement, de productivité et de rétention des talents.
Une culture favorable au bien-être et à la santé mentale
Les entreprises peuvent prendre proactivement des mesures pour instaurer une culture promouvant la santé mentale et le bien-être. Des mécanismes de feedback régulier permettraient d’identifier des problématiques spécifiques face auxquelles les collaborateurs se sentent soutenus ou non. Interprétées efficacement, ces données offriraient un aperçu des stratégies susceptibles de promouvoir la santé mentale.
La mise en place d’un cadre de communication transparent peut également réduire considérablement la sensation d’isolement, et permettre ainsi aux salariés d’exprimer librement leurs préoccupations. Les organisations peuvent ainsi cultiver un environnement inclusif faisant du bien-être et de la santé mentale une priorité et une part intégrante de leur stratégie. Pour y parvenir, elles doivent être prêtes à changer leurs modes de travail et à examiner les facteurs impactants, comme le rôle des collaborateurs, les déplacements requis et l’environnement de travail, par exemple.
Les performances des salariés étant également fortement affectées par leur vie en dehors du travail, il est essentiel d’adopter une approche globale en matière de bien-être en s’attaquant à la santé physique, mentale, financière et sociale. En faisant du bien-être une part intégrante de leur culture et de leur mode de leadership, les organisations peuvent créer un environnement où leurs salariés peuvent s’épanouir, et profiter ainsi d’une évolution professionnelle positive sur le long terme.
En outre, en investissant dans des formations complètes pour encourager les responsables à faire preuve d’empathie et d’intelligence émotionnelle, les expériences des collaborateurs seront également améliorées. Les dirigeants qui comprennent les subtilités des défis que leurs équipes doivent relever au quotidien insufflent une dynamique où les salariés se sentiront entendus, reconnus et valorisés.
Perspectives d’avenir
Si certaines entreprises ont déjà pris de telles initiatives, le chemin reste néanmoins encore long. Avec l’évolution constante du monde du travail, nous devons nous engager à repenser et à remodeler les environnements professionnels afin de soutenir véritablement le bien-être et la santé mentale.
Les dirigeants sont conscients que la santé de leurs collaborateurs a un impact direct sur leurs résultats. En favorisant une culture du bien-être reposant sur les quatre axes que sont l’alignement, le soutien, la résilience et l’équilibre, les entreprises peuvent aider leurs salariés à s’adapter aux complexités constantes du monde du travail actuel.
Ce faisant, les dirigeants pourront offrir un avenir meilleur à leurs collaborateurs, et bénéficier en retour d’une main-d’œuvre plus productive et engagée, épanouie à la fois au bureau et à l’extérieur.