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Par Ricardo Roman, Head of France & Benelux Finance, Transport, Retail & Luxe d’Infobip

L’intelligence artificielle a toujours éveillé la méfiance, particulièrement la manière dont elle est dépeinte dans la science-fiction et la culture populaire, jusqu’à son arrivée dans notre vie de tous les jours. En effet, les récents développements de cette technologie ont de quoi dérouter. 

Qu’il s’agisse de la rédaction d’articles, l’élaboration de stratégies précises, voire de thèses universitaires ; tout cela ne laisse rien présager de bon ; alors que d’autres usages sont cependant plus optimistes, notamment pour les entreprises qui facilitent la communication entre les marques et les clients. Ici, l’IA permet d’automatiser certaines tâches, créer des solutions plus innovantes, mais encore faut-il que les règles soient bien définies pour que cette prérogative soit respectée. Se reposer sur une technologie pour avancer sur des projets qu’auparavant seul l’humain maîtrisait, et qui lui permettait de constamment continuer à évoluer, représente une menace. Il est donc essentiel de trouver un équilibre entre l’assistance que l’IA peut fournir, et la créativité humaine ; tout cela pour garantir que l’évolution humaine ne se trouvera pas freinée dans sa poursuite continuelle de progrès.

Le mirage de l’IA comme solution miracle à tout

Penser que l'IA est la solution qui permettra de résoudre tous les problèmes au sein d’une entreprise est tout simplement trop beau pour être vrai. Aujourd’hui, investir dans l’IA est une nécessité, et ce ne sont plus seulement les entreprises de la Tech qui ont franchi le pas. Qu’il s’agisse des ressources humaines, de la défense, voire de l’industrie musicale, aucun secteur n’est laissé au hasard. 

Mais dans la nature de l’investissement, il faut distinguer les applications qui en découleront. Courir le risque d’une utilisation abusive de cette technologie peut aller très vite. 

L’IA doit-elle remplacer l’humain dans la gestion des RH ? 

Faut-il automatiser les prises de décisions militaires ? 

La création musicale va-t-elle se définir dans le futur sur des logiciels qui créent leurs propres chansons ? 

S’il y a quelques années ces suppositions restaient farfelues, elles peuvent désormais raisonnablement se poser.

L’IA comme solution miracle peut dès lors conduire à de mauvaises applications. Car aujourd’hui, bon nombre d’entreprises pensent que l’IA peut remplacer certaines fonctions humaines, par exemples les développeurs, voire les chefs de produits. Elle peut certes remplacer l’application de tâches courantes des métiers jusqu’à un certain niveau, et exécuter des tâches avec des résultats qui peuvent être pertinents. Néanmoins, elle n’aura jamais cette expertise humaine et unique que nous possédons.

Aucune source fiable de données de référence

Cela va aussi de pair avec le manque de transparence dans les sources de données qu’elle utilise comme base. Où commence le discernement et où son intelligence s’arrête-t-elle ? Tout reste trop artificiel ! Et comme l’IA est une technologie relativement nouvelle, elle doit encore se perfectionner. 

Pour ce faire, elle a besoin de données afin d’avoir suffisamment de ressources pour apprendre et évoluer. Cette absence de source unique où les données sont vérifiées et fiables pose certains problèmes. L’IA apprend certes grâce à des sources très variées, mais à aucun moment il n’est possible de connaître l’exactitude des informations qui ont mené à une réflexion. Il y a quelques années, Microsoft lançait le robot Tay, qui en moins de 24 heures a tenu des propos conspirationnistes, négationnistes et racistes. Et sur quelle base ce robot se basait-il ? Sur des conversations Twitter… Preuve en est-il qu’une source vérifiée pour développer l’IA est indispensable, par crainte d’entraîner des biais potentiels, voire dangereux et d’obtenir des résultats biaisés et sans aucune fiabilité.

Un impact sociologique et sociétal risqué

L’arrivée de ChatGPT à grande échelle a chamboulé le monde. Dans celui de l’éducation, il a été retentissant, si bien que Sciences Po a dû interdire en début d’année à ses étudiants d’utiliser le logiciel pour leurs devoirs, sous peine de sanctions. Si on ne peut pas freiner l’évolution, chose qu’il ne faut surtout pas faire, il est important de l’encadrer et de poser des limites. Le fait d’interdire aux étudiants d’utiliser ChatGPT doit être vu comme un bénéfice pour les étudiants. Jamais la facilité n’a permis de progresser, et c’est d’ailleurs un frein à l’éducation. 

Compter sur l’IA pour emprunter des raccourcis dans ce domaine peut entraver le véritable apprentissage, et pose des risques à long terme pour les normes éducatives. Apprendre à apprivoiser l’IA devrait être enseigné, en mettant en avant l’intelligence individuelle (et collective) des élèves, afin de leur faire comprendre qu’elle maîtrise la technologie, et non le contraire.

L'IA implique également la responsabilité personnelle de se former, la responsabilité de former les autres, ainsi que la responsabilité des législateurs d'encadrer son utilisation. En outre, il est de notre devoir de rechercher les moyens qui auront un impact positif sur la société.

L'imprimerie de Gutenberg, tout comme l'internet, a bouleversé la société, la communication et les relations sociales. Aucune marche arrière n'a été entreprise. Si l'IA modifie progressivement notre société, c'est également à nous de participer à cette révolution.

Au-delà de la sphère de l’entreprise, l’impact sociologique plus large de l’IA dépasse les préoccupations du monde du travail. L’utilisation excessive de l’IA dans divers domaines, en particulier chez les jeunes générations, doit faire l’objet d’une attention particulière afin d’éviter des effets néfastes et irréparables sur l’apprentissage et le développement. Il en va d’une responsabilité collective de réflexion à avoir sur le futur de l’humain et ses objectifs pour les générations futures.

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