Par Harold Li, Vice-Président d’ExpressVPN
Qu'il s'agisse de la liberté d'utiliser des services en ligne sans craindre de subir un préjudice ou de la liberté d'accéder à l'information au-delà de la censure et de l'oppression. Au cours des dix dernières années, les réseaux sociaux ont assis leur influence dans l’exercice de ces libertés. Cependant, leur essor a également suscité de nombreuses inquiétudes.
Aujourd’hui, 55,1% de la population mondiale est active sur les réseaux sociaux, soit 4,33 milliards de personnes. Pour les générations qui entrent actuellement dans l’âge adulte (génération Z), les réseaux sociaux font partie intégrante de leur vie. D’ailleurs, 100% des membres de la génération Z sont actifs sur au moins un réseau social, et 59% des Français de cette génération admettent faire davantage confiance aux réseaux sociaux qu’aux médias traditionnels pour s’informer. La cause principale selon eux : la censure et la désinformation.
Plaçons-nous le curseur de la confiance au bon endroit ?
Il ne fait aucun doute que les réseaux sociaux jouent un rôle important dans la société actuelle. Même si la génération Z est considérée comme mieux informée sur le numérique et les comportements à adopter que leurs aînés, elle reste impuissante face aux grandes entreprises de la Tech qui dictent eux-mêmes leurs règles d’utilisation.
Frances Haugen, la lanceuse d’alerte de Facebook a fait la une des médias pour ses nombreuses accusations à l’encontre du géant américain, notamment sur les effets nocifs que l’entreprise aurait à l’encontre des démocraties, de la sécurité publique et des jeunes utilisateurs.
Cela entre en résonance avec les révélations de septembre 2021 faites par le Wall Street Journal autour des Facebook Files, où l’on découvrait que le groupe serait totalement conscient des dangers de l’application Instagram sur les adolescents. Ces révélations n’étaient pas les premières, si l’on se souvient du scandale Cambridge Analytica de Facebook en 2018, qui a révélé que la plateforme collectait des informations sur les utilisateurs pendant des années, et les avait même utilisées pour manipuler certaines situations et comportements. Cette affaire a d’ailleurs permis à bon nombre de documentaires et articles de voir le jour afin de montrer aux utilisateurs qu’il était important de mieux protéger leurs données en ligne.
Mais même après ces scandales, Facebook fait toujours preuve de peu de considérations à l’égard de la vie privée et des libertés de ses utilisateurs, sans que les plus jeunes générations n’en soient réellement conscientes. Le droit général à la vie privée a pourtant été introduit en 1948 avec le 12e article de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Mais avec l’évolution de nos vies à travers le numérique, celui-ci a évolué, englobant chaque aspect de nos vies en ligne et hors ligne. Les gouvernements sanctionnent financièrement les entreprises du numérique pour tenter de remédier à ce problème, Facebook et Google ont récemment écopé respectivement de 60 et 150 millions d’euros d’amendes de la part de la CNIL. Il semble pourtant que ces montants astronomiques n’aient aucun effet sur ces entreprises pour leur faire respecter la loi.
Qu’est-il donc possible de faire ?
Les outils numériques agissent comme une porte d'entrée sur le monde, notamment pour les Millennials et la génération Z, et sont souvent leur première source d'information et de communication avec le monde extérieur. Imposer davantage de réglementations sans autres actions critiques ne résoudra pas les problèmes liés à ces plateformes sociales. Après tout, de nombreuses grandes entreprises technologiques ont été condamnées à des amendes pour leur mauvais comportement en matière de données, mais peu d'entre elles ont véritablement changé leurs habitudes.
Les sociétés à l’origine des réseaux sociaux parlent souvent de leur désir de « faire une différence dans le monde ». Nous voyons leurs PDG siéger devant les gouvernements, discuter de l'importance de nos droits à la vie privée et de la manière dont cela devrait se traduire par de bonnes pratiques en matière de données. Et on se demande s’il ne s’agit pas uniquement de mots ne se traduisant jamais en actions. Supposons que ces entreprises veuillent faire la différence. Dans ce cas, il est étrange qu'elles ne soient pas à la hauteur des promesses qu'elles font, en prenant des mesures concrètes et réelles pour modifier le fonctionnement de leurs plateformes, afin d'en faire des lieux plus sûrs pour les utilisateurs.
Le monde numérique tend à redéfinir les interactions du futur, la vision de la société, et donc les comportements sociétaux dans leur ensemble. Ce sujet aussi passionnant qu’effrayant doit concrétiser des agissements d’ordre général. Le triptyque états-entreprises-citoyens n'est pas seulement une solution à lancer pour calmer les esprits, elle doit être réellement appliquée. Les entreprises comme Facebook le souhaitent-elles vraiment ? Des générations entières sont victimes d’un mal-être grandissant simplement du fait d’applications mal régulées et prêtes à tout pour collecter toujours plus de données. Elles ne réalisent pas non plus qu'une fois leurs données divulguées, ils ne peuvent (ou du moins très difficilement) ni les reprendre ni les réclamer, puisqu'elles ne leur appartiennent plus à partir du moment où ils acceptent les conditions d’utilisation.
Pour une amélioration de notre futur numérique
La mutation de Facebook en Meta doit interpeller l’ensemble de la société sur les dérives irréversibles que notre monde va connaître dans peu de temps, en un lieu d’interactions toujours plus numérisées, faisant presque écho à la science-fiction. Il est temps d’agir avec convictions si nous ne voulons pas voir ces entreprises, presque plus puissantes que les états eux-mêmes, imposer leur vision sur la liberté, continuer à collecter des données, et menacer la vie privée de milliards d’individus sans pouvoir revenir en arrière.
Il est aujourd’hui compliqué de devoir faire face, de front, à la négligence de ces entreprises de la Tech et à l’aveuglement législatif. Il est également difficile de s’imaginer à quoi ressemblera l’avenir. Il faudra cependant une volonté commune du peuple, des gouvernements et de l’industrie technologique pour définir ce que signifie d’avoir une vie privée dans une société numérique. Autrement, nous serons contraints de suivre aveuglément la vision du monde d’entreprises technologiques géantes, et les laisser réglementer la liberté numérique par procuration. Si le passé nous a appris quelque chose, c’est que nous ne souhaitons pas de cet avenir pour protéger nos libertés.