Souffrance au travail .. - Première plateforme dans la prise en charge du stress au travail et la gestion des risques psychosociaux par des psychologues diplômés [1], PROS-CONSULTE publie son premier baromètre annuel. Etabli sur la base de plus de 17.000 appels [2] traités entre 2016 et 2017, par Pros-Consulte, ce baromètre dresse le panorama des principaux motifs de stress en milieu professionnel en analysant la souffrance des salariés.
Les principaux enseignements de ce baromètre révèlent une problématique relationnelle grandissante avec la hiérarchie (conflits +3,2 points et ressenti de harcèlement +1,2 point entre 2016 et 2017).
Souffrance au travail : une analyse terrain des conditions de travail
Dans le cadre de la prise en charge des risques psychosociaux (RPS) par sa plateforme d'écoute et de conseil, Pros-Consulte reçoit environ 1000 appels par mois émanant de salariés et agents de 600 entreprises publiques et privées. Fort de ses 7 années d'observation de l'évolution du stress en entreprise, la plateforme s'est appuyée sur la grille ANACT (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail) pour établir un classement annuel des facteurs de tension en matière de risques psychosociaux (RPS). A également été mesuré l'impact des problématiques personnelles sur la sphère professionnelle.
Souffrance au travail : les femmes expriment plus leur souffrance au travail
Avec 75,9% des appels en 2017 (en baisse de 1,6 point par rapport à 2016), les femmes représentent la plus forte proportion d'appels. Techniciens et agents sont les fonctions les plus touchées par le stress professionnel (58%) devant les cadres (32%), toutefois on observe une augmentation des appels chez les cadres (+ 3 points par rapport à 2016). La moyenne d'âge des appelants se situe à 45,7 ans.
Souffrance au travail : 37 % des appels sont motivés par les incivilités, les conflits et le harcèlement
On peut observer que l'organisation du travail (40%) et les conflits (37%) sont les deux principaux facteurs de stress au travail, en hausse respective de 1 et 7 points par rapport à 2016. En matière d'organisation du travail, si l'anxiété de la reprise du travail, l'isolement et la recherche de conseil en management baissent légèrement, l'épuisement professionnel (+7,1 points), les problèmes de santé (+4 points) et le traumatisme professionnel (+1 point) connaissent une forte hausse.
[caption id="attachment_6482" align="aligncenter" width="720"] darkmoon1968 / Pixabay[/caption]
Les conflits sont également une forte source de stress en milieu professionnel. Ainsi les conflits avec la hiérarchie génèrent 21% des appels (en hausse de 4 points par rapport à 2016) et les conflits avec les collègues 10% des appels (+ 3 points). Bonne nouvelle, après plusieurs années de hausse, les agressions et incivilités tendent à diminuer en 2017 (-3 points), une baisse à observer afin de voir si elle se confirme en 2018.
Souffrance au travail : le manque de reconnaissance (7,4 % en 2017) et le poids du professionnel sur la vie privée (5,7%) impactent également la qualité de vie au travail.
Signe des temps et de l'exigence accrue en milieu professionnel, l'ensemble des appels gérés par la plateforme émane de personnes en souffrance qui ont besoin d'écoute et d'accompagnement. Ce sont ainsi plus 6 personnes sur 10 qui sont orientées par les psychologues de PROS-CONSULTE vers des praticiens (médecins généralistes, psychologues en face à face, psychiatres, médecins du travail, DRH, IRP, associations d'aide aux victimes, Centres Médico-Psychologiques) à l'issue de leur appel.
La souffrance au travail progresse pour 90 % des Français et les réponses manquent
À l’occasion des Semaines d’information de la santé mentale, le groupe MGEN a réalisé, avec OpinionWay, une étude sur le vécu des actifs en France en matière de santé mentale au travail. Leur conclusion : alors que la souffrance leur apparaît comme une réalité de plus en plus forte, ils ne trouvent pas de réponses satisfaisantes auprès de leur hiérarchie, des RH ou de la médecine du travail.
- 90% des actifs pensent que la souffrance au travail a augmenté depuis 10 ans.
- 96% considèrent que souffrir du travail peut arriver à tout le monde.
- 71 % des personnes en souffrance n’ont perçu que de l’indifférence de la part de leur hiérarchie.
- De retour d’arrêt de travail, 55% ne se sont rien vu proposé par leur hiérarchie et les RH.
Étude réalisée auprès d’un échantillon représentatif de 1008 personnes actives, du 3 au 28 février 2017, à retrouver en intégralité sur mgen.fr.
90% des actifs pensent que la souffrance au travail a augmenté depuis 10 ans. Interrogés sur le nombre de personnes qu’ils imaginent concernés par la souffrance, ils sont 51% à répondre 1 sur 10 (1 sur 100 : 29%).
Pour eux, la souffrance est d’abord d’ordre psychologique. 66% y associent le stress, 60% le harcèlement moral, 56% le burnout, avant l’épuisement (48%) et le harcèlement physique (15%). Ils décèlent des causes du même ordre : le stress (46% des répondants) et le harcèlement moral (27%) mais aussi le manque de reconnaissance de la hiérarchie (27%).
96% considèrent que souffrir du travail peut arriver à tout le monde. 61% ont déjà ressenti cette souffrance et 55% déclarent avoir dans leur entourage professionnel des personnes concernées.
Les personnes qui ont ressenti la souffrance au travail l’ont souvent vécue pendant des périodes longues : 28% pendant plusieurs mois, 34% pendant plusieurs semaines d’affilées. Cette souffrance s’est exprimée par un stress récurrent pour 54% des personnes interrogées et de l’épuisement pour 39% d’entre elles. Elle a engendré chez les personnes de la démotivation (67%), de la dépréciation de l’image qu’elles se font d’elles-mêmes (52%) et de la perte de confiance (44%).
30% de ceux qui ont déjà ressenti cette souffrance ont bénéficié d’un arrêt. Et si 60% ont le sentiment d’avoir retrouvé leur place, 55% ne se sont rien vu proposé à leur retour d’arrêt de travail.
Respectivement 71% et 58% des personnes qui ont vécu de la souffrance au travail déclarent en effet que leur hiérarchie et que leurs services RH n’ont pas compris ou ont été indifférents à leur mal-être. A l’inverse, 87% estiment que leurs collègues les ont aidés et 52% déclarent que les représentants du personnel leur ont proposé des aides concrètes et des solutions. Des chiffres confirmés par les difficultés de communiquer : 66% ont parlé spontanément de leur souffrance : 55% avec leurs collègues proches mais seulement 24% avec leur hiérarchie, 18% avec le médecin du travail, 18% avec un représentant du personnel et 12% avec les ressources humaines.
La médecine du travail n’apparaît pas comme un recours. Seulement 32% auraient l’idée de parler de leur souffrance à leur médecin du travail. 71% disent enfin ne pas savoir s’il existe ou non des dispositifs pour répondre ou prendre en compte des situations de souffrance.
Eric Chenut, vice-président délégué du groupe MGEN :
« Au vu des impacts économiques, sociaux et humains, les résultats de cette enquête nous invitent, en tant que mutuelle professionnelle, à nous réinterroger de manière systémique sur la question du travail – son organisation comme le sens, la place et la contribution de chacun – afin de promouvoir la coopération, les collaborations, l’intelligence collective. »
Et si l'on parlait aussi de « l'avant Burnout » ?
« L’épuisement professionnel (ou burnout) est un processus de dégradation du rapport de l’individu à son travail ; processus au bout duquel, complètement vidé de ses ressources, il s’écroule ». [1]
Voilà donc le maître-mot : un PROCESSUS, ce qui suppose un cheminement par lequel l’individu se rend progressivement exsangue de toutes ses forces vives.
Le repérage :
- De signaux collectifs par des indicateurs liés au fonctionnement de l’entreprise (temps de travail, relations sociales, organisation du travail...) et des indicateurs liés à la santé et à la sécurité au travail (accidents du travail, suicides, harcèlements signalés...) ;
- De signaux individuels (vigilance de l’encadrement ou des acteurs de la prévention devant un changement de comportement au travail...) ;
permet l’identification de facteurs de risques psychosociaux (RPS).
Il est maintenant établi que les actions entreprises pour agir sur les facteurs de RPS sont autant de moyens préventifs du burnout.
Les articles L.4121-1
« L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs... » et L.4121-2 du Code du travail en son alinea 9 « Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L.1152-1 ;... » imposent en lieu premier à l’employeur une obligation de sécurité.
L’article L.4122-1 du Code du travail
« Conformément aux instructions qui lui sont données par l'employeur, dans les conditions prévues au règlement intérieur pour les entreprises tenues d'en élaborer un, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail » attribue donc également au salarié une obligation de sécurité, dite de moyens, pour lui-même et pour les autres, renforcée de fait selon sa responsabilité managériale.
Depuis la financiarisation des entreprises, le travail s’est quelque peu retrouvé au service du résultat financier. La disruption apportée par cette nouvelle définition du travail a abandonné et abandonnera encore de nombreux laissés pour compte sur la route de leur carrière professionnelle, souvent au terme du lourd tribut payé par leur santé.
Comment essayer de sauvegarder sa santé ? Comment essayer de lutter contre l’engrenage du processus précité?
Le harcèlement moral, le bore-out, le brown-out s’avèrent être de surcroît autant de catalyseurs du burnout.
Alors avant que le stress, la peur, le présentéisme et la mésestime de soi, remplaçant subrepticement le « travail plaisir », ne finissent immanquablement par envahir le quotidien en affectant également la vie personnelle, avant de voir poindre les signes annonciateurs de cet épuisement provoquant ce terrassement si spectaculaire, il apparaît important de visualiser régulièrement non seulement le positionnement de son entreprise, mais également et surtout son propre positionnement au sein de celle-ci.
Au-delà d’une idéale politique de maîtrise des risques professionnels menée par l’entreprise, il doit être gardé à l’esprit de chacun la notion de préservation de sa santé, sans omettre sa santé mentale. C’est une démarche individuelle d’acteur, certes difficile et anxiogène, mais il devient indispensable devant la débutante chronicité d’un mal-être au travail de se questionner sur la pertinence de son poste, sur l’adéquation de ses compétences en rapport avec le poste tenu, sur son ratio objectifs/moyens, sur les difficultés rencontrées (perfectionnisme, organisation, relations...) avec la meilleure honnêteté et objectivité possibles et de s’en ouvrir « rationnellement » à la Direction des Ressources Humaines.
D’autre part, si celui-ci vous est le cas échéant accessible [2], pourquoi ne pas assortir cette démarche d’un bilan de compétences?
Sauvegarder sa santé passe aussi par une « professionnalisation de son investissement au travail ». Qu’un surengagement soit lié à un rapport disproportionné au travail ou à une insécurité de l’emploi, il représente hélas le premier palier d’un débordement ouvrant une large porte au burnout.
Enfin, souvenons-nous que le sens au travail reste encore une fort belle gratification, notre meilleur guide au travail et ce, nonobstant des situations organisationnelles de conflits de valeurs rencontrées.
[1] Guide pratique à la prévention « Le syndrome d’épuisement professionnel ou burnout » Mieux comprendre pour mieux agir – Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social - Anact – inrs
[2] http://travail-emploi.gouv.fr/formation-professionnelle/formation-professionnelle-des-salaries/article/le-bilan-de-
competences