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Par Philippe Le Gloahec, Consultant Manager, Hardis Group

En 2030, tous consultants ? C’est une question récurrente ces dernières années. Mais qui n’est pas toujours posée dans les bons termes : il ne s’agit pas tant d’une question de statut ou de fin annoncée du contrat de travail, mais de l’avenir des organisations et de la posture de chacun de leurs membres, qu’ils soient internes ou externes.

Organisation traditionnelle du travail : les limites sont atteintes ?

Tout a été dit et écrit depuis – déjà – de nombreuses années sur la fin de l’organisation traditionnelle des entreprises, et notamment des plus grandes, auxquelles il est reproché une certaine forme d’inertie pour changer leur business model ou encore des niveaux hiérarchiques trop nombreux, néfastes à l’agilité, à l’innovation, à la créativité et à la coopération. Mais les méthodes pour corriger ce défaut font débat. Les initiatives de mise en œuvre de modèles managériaux alternatifs (entreprise libérée, entreprise agile ou encore start-up) connaissent, à ce stade, des réussites variables. En effet, si les méthodes agiles ou libérées s’appliquent très bien aux petites équipes, elles peuvent parfois être déroutantes dans des organisations qui n’ont pas cette culture inscrite dans leur patrimoine génétique.

En parallèle, les grandes entreprises rencontrent des difficultés de recrutement comme elles n’en ont que rarement connues. Difficultés dont une partie est imputable à l’image traditionnelle et peu agile qu’elles renvoient, en particulier aux générations les plus jeunes, qui aspirent à d’autres formes de travail et d’équilibre entre vie professionnelle et personnelle.

Le tout sur fond de politique publique de l’emploi qui tâtonne (flexisécurité, contrat de chantier, CDI zéro heure, etc.) et d’interrogations – aussi bien de la part des acteurs économiques que des observateurs – sur les conséquences du développement de l’intelligence artificielle sur les emplois à venir.

Consultant : un état d’esprit plus qu’un statut

Plus que jamais, les entreprises doivent faire preuve de résilience et être capables de s’adapter à un environnement (concurrence, demandes des clients…) qui évolue de plus en plus vite, notamment du fait de la digitalisation de pans entiers de l’économie. Par effet de bord, les mêmes remises en question s’imposent aux collaborateurs, et plus globalement à tous les actifs. Il est d’ailleurs admis que la plupart des actifs d’aujourd’hui exerceront plusieurs métiers au cours de leur vie.

Pour faire face à ces enjeux et pérenniser les emplois, les entreprises doivent transformer la relation entreprise-collaborateurs en une relation client-fournisseurs, accompagner leurs collaborateurs à devenir des coproducteurs efficaces et encourager l'intrapreneuriat au sein de leurs équipes. Avec cette nouvelle approche, l’entreprise assemble des compétences internes et externes, en fonction des projets. De leur côté, et les collaborateurs sont en mesure d’offrir bien plus que ce qui figure dans leur fiche de poste. L’efficacité du collectif s’en trouve renforcée ainsi que la motivation et la fidélisation de chaque collaborateur.

Pour réussir ce changement de paradigme, l’entreprise doit inciter ses collaborateurs à développer leur polyvalence et à délivrer leurs compétences sous des formes qui étaient jusque-là réservées aux sociétés de conseil extérieures : production, assistance, conseil, formation, coaching, facilitation d’intelligence collective, etc. Ou, autrement dit, inviter les collaborateurs à adopter une attitude de consultant dans leur façon de travailler. A terme, l’ensemble des membres d’une équipe deviendraient donc des consultants, quel que soit leur statut (collaborateur interne, consultant salarié externe ou indépendant).

Nouvelles habitudes et nouveaux outils de travail

Derrière ces changements profonds des modes de travail, se profilent des évolutions sociétales majeures. A commencer par la modification des lieux depuis lesquels l’activité professionnelle peut s’exercer, qui s’est amorcée depuis quelques années : télétravail, tiers lieux (espaces de co-working, Living Labs ou Fab Labs, pour favoriser le partage, la co-création et la co-innovation) ou travail nomade, à l’aide d’un ordinateur ou d’un smartphone.

Avec la disparition du lieu unique de travail, c’est tout l’aménagement du territoire (foncier, transports, infrastructures de communication…) qui s’en trouvera profondément modifié : locaux plus petits pour les entreprises qui n’accueilleront plus tous leurs collaborateurs en même temps, habitat plus grand et/ou plus éloigné pour les collaborateurs qui travaillent en partie de chez eux et n’ont pas à se rendre quotidiennement sur leur lieu de travail, accès à la fibre généralisé, etc.

Tandis que les entreprises et collaborateurs devront non seulement entrer dans une véritable forme de confiance mutuelle, mais surtout s’équiper des outils de communication et de collaboration indispensables pour maintenir le lien de chaque individu avec le reste de l’équipe ou de l’organisation.

Dans tous les cas, les interactions humaines, au travers d’un outil ou de visu, resteront sans aucun doute la condition sine qua non à la réussite collective et par voie de conséquence de chacun des « consultants » de l’organisation.

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